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Roussillon : balade dans les Aspres et la vallée de l’Agly (1/2)

Impressions d’un bref voyage dans le sud du Roussillon avec deux autres journalistes belges. Quelques sympathiques découvertes présentées en deux étapes.

 

Château de Rey – Canet-en-Roussillon

02 sisqueillePremière visite : le Château de Rey, chez Cathy Sisqueille à Canet-en-Roussillon, sur la Têt, le fleuve qui traverse Perpignan, un domaine découvert en 2017 lors d’une précédente visite. Les principaux enjeux sont ici de lutter contre la sécheresse, de capter l’eau de pluie dans des fossés grâce à des barrages de pierres et de lutter contre les maladies. C’est la première chose évoquée par la vigneronne lors de notre visite, qui rappelle tout d’abord les trois dernières années de sécheresse.

Dix-huit cépages sont ici plantés sur 25ha, un domaine racheté par Cathy et son mari aux sœurs de ce dernier en 1996, après dix ans de fermage et d’interruptions diverses. A l’époque, la propriété couvrait déjà 40ha mais une bonne partie a été arrachée et replantée. Pour les rouges, on retrouve bien sûr les classiques Grenache, Mourvèdre, Carignan, Syrah, Cinsault et la Counoise. En blanc, Grenache blanc et gris, Macabeu, Muscat d’Alexandrie, Carignan blanc, Xiarelo, Terret et Tourbat, plantés selon les courbes de niveau.

01 sisqueille

« La propriété est conduite sur labours, explique Cathy, un travail nécessaire à un développement racinaire en profondeur. La vigne développe ainsi une meilleure résistance aux sécheresses estivales, tout en puisant loin d’une surface pauvre la minéralité et la typicité qui font tout le charme et la singularité de son terroir. Les traitements phytosanitaires ne sont appliqués qu’en cas d’agressions ou de menaces tangibles. Notre principal allié dans cette lutte reste la tramontane qui sèche et assainit feuillage et fruits, les protégeant naturellement des diverses maladies que favorise l’humidité » (et la proximité de la mer).

Vingt ans après la reprise, Rémi a rejoint ses parents et aimerait passer la propriété en bio, même si les soucis évoqués ci-avant ne facilitent pas les choses. Sans parler de l’Eudémis, le ver de la grappe et les voisins qu’il a fallu convaincre. Mais ce fut le cas, et 2022 fut le premier millésime bio pour le Château de Rey qui est donc en pleine mutation.

Dans la gamme des vins, que l’on trouve en Belgique au Comptoir des Vins et chez Sudvin à Braine-l’Alleud,  nous en avons goûté une douzaine, trois m’ont plus particulièrement séduit

  • Le banc 2024 : nouveauté de l’année, créée par Remi. Macération de 4 à 5 jours de Muscat d’Alexandrie en grappes entières et en amphore, aucun sulfitage, un vin qui a du corps, avec une légère amertume finale. Juste parfait.
  • Le petit Roure 2023 AB: un autre vin de Remi, 100% Grenache en Côtes catalanes. La macération carbonique pousse ici l’acidité du raisin qui offre un profil moderne. Peu de tannins. Souple et agréable.
  • Galets roulés 2022 AB – Côtes du Roussillon: un vin qui a une structure bien solide grâce à l’assemblage Syrah/Grenache avec un peu de Mourvèdre à la place du Carignan pour gommer l’effet millésime. Notes grillées et chocolatées en finale. A consommer à table. Top.

Pendant la soirée, Eric Aracil, directeur adjoint du Comité interprofessionnel des Vins du Roussillon a présenté les différents terroirs du Roussillon, j’y reviendrai dans un autre article plus tard.

Domaine Vaquer – Tresserre

04 vaquer vigneronneCap sur les Aspres, une région naturelle située autour de la ville de Thuir (voir plus loin), dont le nom en catalan désigne « une terre rocheuse, rocailleuse et d’altitude, stérile et impropre à la culture », mais favorable à la vigne donc. Nous sommes ici au Domaine Vaquer sur les contreforts du célèbre Mont Canigou, considéré comme la « montagne sacrée » du pays catalan, la région est truffée de petits villages préservé. Le tourisme vert se porte bien dans ce coin, un coin où habite depuis 1912 la famille Vaquer, qui y replanta de la vigne en 1947 avec son fils, les Carignans d’aujourd’hui en sont issus, mais le raisin partait alors à la coopérative, ce n’est qu’en 1968 que les premiers vins du domaine sont mis en bouteille.

Avant de succéder à son père, Bernard Vaquer a fait des études d’œnologie à Dijon. C’est là qu’il rencontre celle qui allait partager son aventure œnologique. En 1991, le couple reprend le domaine mais Bernard décède dix ans plus tard, après les vendanges 2001. Voilà donc notre Bourguignonne a la tête d’un domaine du Roussillon, avec son fils, sans aucun pied de vigne de Pinot noir mais bien de Carignan, Grenache, Syrah, Roussanne, Macabeu, Grenaches blanc et gris, Macabeu ou encore Muscat d’Alexandrie… Le tout étant mené en bio. Les 16 hectares du domaine sont situés à 200 mètres d’altitude, au-dessous du site de la bataille du Boulou en 1794. Douze sont d’un seul tenant et certains vignes ont un âge plus que vénérable et cela donne de magnifiques vins de terroir, vendus à la cave de Visé à Eupen.

03 vaquer

Mes coups de cœur :

  • Espuma 2024, une nouveauté : un vin de Muscat d’Alexandrie et Muscat Petits grains, avec une macération très brève avec les rafles, juste pour la structure, cela donne un vin doré absolument irrésistible. Peu de bouteilles malheureusement.
  • L’expression, Côtes catalanes 2023 : qualifié de Pinot du sud par Frédérique, ce vin de Carignan offre une expression aromatique remarquable et une longueur qui l’est tout autant. Un vin avec un très court élevage en cuve inox, pas de bois. Incontournable.
  • Epsilon 2019 : une Côtes du Roussillon Villages Les Aspres avec une large majorité de syrah, et un apport réduit de Grenache et de Carignan. Le millésime actuellement en vente est le 2018. Une Syrah, bien typée, qui évoque, paraît-il, le ciste, un arbuste prisé en parfumerie mais que je n’ai jamais croisé encore… difficile donc de l’identifier.

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Domaine de Nidolères – Tresserre

Une des visites-clés de notre bref séjour : le domaine de Nidolères et son étonnant parc de panneaux voltaïques pour lutter contre la sécheresse et le changement climatique. J’ai été tellement impressionné que j’en ai fait un article dans Le Sillon belge (sortie fin août – je mettrai le lien). Afin de limiter les excès de rayonnement solaire et les fortes chaleurs, Martine et Pierre Escudié ont signé un accord avec le programme Sun’Agri 34 de l’INRA afin d’installer des panneaux photovoltaïques au-dessus d’une partie de leurs vignes (7,5 ha sur les 35 du domaine).

05 nidoleres

Ce programme vise à accroître simultanément la production agricole et la production d’énergie solaire.  Chaque panneau est piloté individuellement en fonction des besoins des plantes, les données sont mutualisées avec les informations météorologiques et les objectifs de production. Les systèmes agrivoltaïques dynamiques installés au-dessus des cultures fournissent un ombrage transitoire et sont un outil de protection et d’adaptation aux changements climatiques de la vigne, qui optimise la production viticole dans sa qualité, tout en préservant de hauts rendements. L’ombrage piloté peut également diminuer la température des vignes sous panneaux de 5°C en période caniculaire et diminue le risque de gel. Il y a également un système d’irrigation qui s’autogère en mesurant l’hydrométrie du sol jusqu’à un mètre de profondeur.

Le système a attiré des vignerons du monde entier qui sont venus visiter le domaine, du Chili à l’Argentine, en passant par l’Afrique du Sud, l’Australie, la Nouvelle-Zélande. Seul bémol : si le bilan agronomique est positif, le problème est surtout d’obtenir de meilleures ventes de vins. Mais ce n’est pas propre à Nidolères, et les incendies récents, qui n’ont toutefois pas touché cette partie des Pyrénées orientales, ne vont pas arranger les choses.

Marc Vanel, 12/08/25

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