Créé en 2010 par la famille Ewbank et Filip Remue, le domaine du Chant d’Eole est devenu en dix ans l’une des grosses locomotives du vignoble wallon. Portrait de German Mulet, responsable de sa production rencontré fin avril.

Comme dans de nombreux domaines en Belgique, les dernières semaines ont été marquées au domaine du Chant d’Eole par la plantation d’une nouvelle parcelle de trois hectares, en plus des 16 déjà existants à la fin du mois d’avril.

“Au Chant d’Eole, explique le responsable de production German Mulet, nous plantons actuellement trois hectares (un peu moins de 30.000 pieds) selon la répartition des cépages du domaine, soit 85 à 90% de Chardonnay (pour notre Blanc de Blancs) et 10 à 15% de Pinot noir (pour le rosé). C’est le début d’une grande aventure car le projet est de passer à 40ha dans les trois à quatre ans, peut-être davantage.

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© Vanel

Cette plantation a été précédée de nombreuses réunions techniques, de discussions avec les responsables du vignoble, avec les pépiniéristes, et les choix tant des variétés que des porte-greffes, se font aussi bien sûr en fonction des analyses de sols.

“C’est le moment pour les plantations, précise German, même en plein confinement. Nous sommes en quarantaine, mais dans un pied de vigne, il y a de la vie, et celle-ci ne s’arrête pas. On plante pour 25 à 40 ans, c’est une prise de décision très importante. Il faut avancer des fonds importants et il n’y aura pas de bénéfices avant 10 ans, certains actionnaires ne les verront même jamais. C’est un projet qui passe de génération en génération, il faut être passionné”.

De Saint-Emilion à Quévy

Et passionné, il l’est. German Mulet a en effet quitté une très belle position à Margaux et à Saint-Emilion pour venir au Chant d’Eole. “Je suis originaire de Mendoza en Argentine, explique-t-il, ma famille a un vignoble de 15 ha, mais mes parents m’ont toujours encouragé à étudier, voyager et découvrir. J’ai été formé dans mon pays, puis en Espagne, mais j’avais des fourmis dans les jambes et je ne suis pas retourné en Argentine. J’ai travaillé de 2012 à 2017 dans des grands domaines à Margaux et à Saint-Emilion. Je pensais que j’étais arrivé au top quand mon téléphone a sonné, me proposant de venir travailler le vignoble ici à Quévy.

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© Vanel

Pour être honnête, je ne savais même pas qu’il y avait de la vigne en Belgique. J’étais très fatigué à l’époque et j’avais besoin d’un week-end de repos. Je suis donc venu passer une journée, et Hubert Ewbank m’a fait faire le tour, nous avons aussi discuté avec les actionnaires. En moi-même, je trouvais le projet passionnant mais trop loin de Saint-Emilion et surtout sans soleil… De retour à Bordeaux, même si tout le monde me traitait de fou de quitter ma place à Saint-Emilion, j’ai accepté de relever le défi et cela fait trois ans que je suis là. Et je crois toujours que c’est le premier jour… La Wallonie avait l’or noir autrefois, mais ici, c’est l’or blanc du calcaire, une richesse incroyable, ce sont des terroirs très enviés. Passer du vin rouge aux bulles, m’intéressait aussi. C’est un autre métier, pas plus facile, mais dans la méthode traditionnelle, on peut transformer son produit jusqu’à la dernière minute, jusqu’au dégorgement même, lui donner notre marque, c’est passionnant.

Médailles

Les sols calcaires de cette région du Hainaut ont permis au Chant d’Eole de produire depuis six ou sept ans des vins effervescents de plus en plus raffinés, qui remportent de nombreux prix dans les concours. La Révélation internationale dans la section Vins effervescents du Concours mondial de Bruxelles est encore dans toutes les mémoires. “Quand on gagne un prix, c’est tout le vin belge qui gagne, pas un domaine en particulier. On doit être tous solidaires, mettre en valeur les produits de chez nous. Les Français arrivent à vendre beaucoup car ils sont très fiers de leurs produits, nous devons être davantage fiers des nôtres. Cela ne sert à rien de partir en Champagne acheter des bouteilles, on a tout ici…”

> La gamme des vins du Chant d’Eole est disponible chez les meilleurs cavistes. Infos: chantdeole.be

Marc Vanel, 25/05/20