Enjeu majeur de la viticulture belge, mais aussi internationale, la question de la durabilité des pratiques culturales est désormais incontournable.
Créée en 1924, l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV) existe sous sa forme actuelle depuis le 3 avril 2001. Elle est composée de 49 États qui représentent 85% de la production mondiale de vin et près de 80% de la consommation mondiale.
Après quelques années d’absence, la Belgique est à nouveau membre de cette honorable organisation, trois délégués issus des deux communautés linguistiques y représentent tous les vignerons du pays.
Côté wallon, Véronique Lidby (oenologue) siège pour la Région wallonne dans le groupe d’experts OIV depuis 2022 et jusque début 2025, et Nathalie Perelmuter, en charge du secteur vin et spiritueux au Service Public de Wallonie, participe au groupe de travail Vin et Alcool de l’OIV. Côté néerlandophone, Timo Delveaux est l’équivalent de Nathalie Perelmuter et représente le Departement Landbouw flamand, avec le soutien de Vicky Everaerts (PCFruit) et de Marc Delooze (ILVO) pour l’OIV.
Lors des débats au sein de la commission « durabilité » à laquelle ces différents représentants belges ont participé, il a été souligné la volonté de redynamiser cette commission, transversale aux autres commissions, pour une mise en œuvre d’une vitiviniculture durable. Cette préoccupation figure d’ailleurs comme premier des six axes du plan stratégique 2020-2024 destiné à promouvoir une vitiviniculture éco-responsable.
Pour rendre compte de la richesse de ces discussions, représentée par le nuage de mots ci-contre, une matinée de discussion a été organisée le 16 juin dernier à Namur, avec plusieurs intervenants afin de faire écho à la demande de la Commission Durabilité de l’OIV : celle de parler partout, à tous niveaux, de durabilité dans les vignobles, dans les chais, et auprès des organismes de formation et de recherche.

Sébastien Doutreloup
Les intervenants
L’objectif de la matinée était essentiellement de permettre la rencontre de vignerons et de quatre chercheurs belges, autour de la thématique du changement climatique : parler des perspectives d’adaptation des pratiques viticoles, du choix du cépage sur une parcelle donnée jusqu’à la conduite de la vigne sous nos latitudes.
Premier à prendre la parole, Sébastien Doutreloup, chercheur à l’ULiège, est spécialisé en climatologie du vignoble belge. Avec d’autres climatologues et chercheurs, notamment de l’Institut de la Vigne et du Vin (Bourgogne), il a utilisé le Modèle Atmosphérique Régional (MAR) développé à l’Uliège afin de comparer le climat belge avec celui de la Champagne, de la Bourgogne, de l’Alsace et du Jura.
Plusieurs indices ont été présentés, ainsi que des modèles d’évolution des conditions climatiques en Belgique. Les risques de gelées printanières après débourrement restent un enjeu majeur pour la filière. Un entretien avec le climatologue a été publié dans la newsletter n°16 des Vignerons de Wallonie en décembre dernier.
Anouck Stalport, ensuite, chercheuse à la Haute Ecole Condorcet Ath, nous a parlé des techniques pour réduire les risques de gelée printanière et nous a expliqué comment la vigne récupère après un épisode de gelée.
Afin de favoriser les échanges et la mise en place de pratiques agroécologiques communes, la chercheuse a également créé au début de cette année le « Groupement de viticulteurs éco-responsables (GVER) » qui s’inscrit dans le cadre du plan de relance de la Wallonie, et plus particulièrement du plan de transition agro-écologique Terraé, visant à soutenir des projets contribuant de manière durable à la transition environnementale en agriculture. Près de 30 vignerons y adhèrent.
Couverts végétaux, mesures de lutte prophylactiques, techniques de gestion durables contre le gel, vitiforesterie… feront l’objet d’expérimentations de terrain afin de pouvoir guider chacun vers les pratiques les plus adaptées à sa propre situation. Infos: condorcet.be

Anouck Stalport
Dans un autre registre, Louis Delval, chercheur à l’université de UCLouvain (Earth and Life Institute), a quant à lui observé et mesuré la capacité de rétention en eau des sols viticoles du domaine W et du Château de Bousval.
Il a ainsi établi que la vigne avait une résilience élevée aux épisodes de sécheresse, en Belgique comme ailleurs, mais de façon différente selon les types de sols et sous-sols et leurs degrés de rétention d’eau.
Enfin, du côté néerlandophone, Vicky Corbeels est chercheuse à l’université d’Anvers et prépare une thèse de doctorat après avoir écrit un mémoire sur la résilience climatique du secteur de production de vin en Belgique en 2021.
Elle a complété les exposés en donnant des chiffres pour la Belgique : choix des vignerons entre cépages classiques et interspécifiques, utilisation du cuivre et de produits phytosanitaires,… Vicky développera un plan de de mesures durables pour les vignerons belges et pour le secteur entier, en considérant la spécificité des vignobles belges et la faisabilité économique.
Infos : https://www.cru-design.com/fr/
Au-delà de cette journée d’échanges, la question de la durabilité fait désormais l’objet d’interventions dans les formations régionales groupes de travail existants (notamment ceux d’EMRWINE pour la province de Liège, du Limbourg et de Zuid-Limburg – NL) et enfin, dans la révision en cours des cahiers des charges des appellations wallonnes… Voir aussi mon article sur le projet: ICI.
Marc Vanel, 07/07/23