Alors qu’en 2023, la Commission européenne a rendu facultative la coiffe de surbouchage des bouteilles de vins effervescents, le Syndicat général des Vignerons de Champagne vient de décider de l’imposer dans son cahier de charges. Alors, stop ou encore ?
La coiffe des bouteilles des vins effervescents est-elle vouée à disparaitre ? L’idée fait son chemin depuis plusieurs années. Née au siècle dernier, la coiffe de surbouchage était alors essentiellement destinée aux bouteilles de champagne et était mise en toute fin de processus d’embouteillage.
D’une part, pour rehausser la présentation de ces vins qui se veulent au-dessus de la mêlée, d’autre part, de façon plus pragmatique, pour cacher les éventuels dépôts à l’intérieur du goulot laissés lors du dégorgement. Cette étape constitue l’ultime finition avant la mise au marché.
Placée sur le manchon du col et par-dessus la plaque du muselet, la coiffe était autrefois en étain, mais au fil du temps, d’autres matériaux ont fait leur apparition avec notamment un mélange d’aluminium et de plastique. Depuis plusieurs années, certains se sont élevés contre cette pratique qu’ils dénoncent comme non écologique ou, à tout le moins, non durable, puisque le tri et le recyclage des coiffes n’est pas possible. Sans parler des problèmes d’approvisionnement des matières premières dans le contexte géo-politique international.
Selon un article publié sur le site de la RVF, « la coiffe représente aujourd’hui 0,6 % des émissions de gaz à effet de serre de la filière. Les progrès réalisés ont déjà permis entre 2003 et 2008 de réduire son impact de 9,5% ».
L’an dernier, la Commission européenne a rendu cette fameuse coiffe facultative et certains vignerons, notamment bio, se sont empressés de remplacer la coiffe de leurs vins effervescents par une simple bandelette de papier ou une ficelle cachetée à la cire, tandis que d’autres optaient pour une solution 100% papier.
On se souvient notamment du Champagne Telmont, racheté en 2020 par le groupe Remy-Cointreau, qui lança avec force publicité un ambitieux programme de conversion totale au bio et de mesures destinées à alléger, voire supprimer, l’empreinte carbone de la maison. Année de la certification, 2017 est le premier millésime de la cuvée bio, « Réserve de la Terre », lancée en 2021 : la bouteille n’est pas « coiffée » et est fermée avec une ficelle.
Pas d’accord
Toujours soucieux de leurs privilèges, les producteurs champenois n’ont pas vu la chose du même œil et ont décidé d’imposer la coiffe dans l’emballage des célèbres bulles.
Alors que faire, la rendre obligatoire ou accepter qu’elle soit facultative ? « Mais la supprimer serait oublier que le consommateur qui achète du champagne, n’achète pas seulement du vin, mais une expérience, un rêve, une histoire, insiste la SGV (qui par ailleurs vend elle-même des coiffes -ndla). Et la coiffe en fait partie. Des études clients menées en France, au Royaume-Uni et aux USA ont prouvé que la coiffe permettait au consommateur d’associer immédiatement une bouteille à du champagne. Sans elle, on pourrait provoquer des confusions avec le cidre, la bière et même l’eau gazeuse. Jouant le rôle d’un « scellé », c’est aussi une garantie d’authenticité du vin qui se trouve à l’intérieur de la bouteille, sans parler de son rôle en matière d’hygiène et de sécurité. Pour toutes ces raisons, la filière Champagne a décidé d’inscrire le port de la coiffe dans le cahier des charges de l’appellation. »
Sachant que la Champagne a expédié en 2023 quelque 300 millions de cols, il y a effectivement un enjeu économique à l’affaire. Mais la décision ne fait pas l’unanimité, certains souhaitent développer les coiffes en papier ou à base d’autres matériaux. Dans ce contexte, le groupe australien Amcor a annoncé le lancement en octobre prochain de la coiffe, « Essentielle », sans plastique. « Elaborée en partenariat avec Moët & Chandon (groupe LVMH), explique le site Vitisphère, cette coiffe nouvelle génération est composée de papier et de 60 % d’aluminium recyclable. Elle permet de réduire l’empreinte carbone de 31% comparé aux coiffes standard avec plastique. »
Et en Belgique?
A ce jour, les producteurs belges de bulles ne se sont pas encore véritablement prononcés (a priori le règlement européen peut être appliqué), c’est sans doute un débat à faire remonter aux deux associations professionnelles, AVW et Belgische Wijnbouwers… Les premiers essais ont toutefois démarré, notamment à Vin de liège et au Domaine Degavre.
Marc Vanel, 25/8/24